La 23e édition de l’Arras Film Festival nous propose cette année plusieurs avant premières dont un film réalisé par Rachid Hami, nommé Pour La France
Synopsis
Lors d’un rituel d’intégration dans la prestigieuse École Militaire de Saint-Cyr, Aïssa perd la vie. Alors que l’Armée refuse de reconnaître toute responsabilité dans ce drame, son grand frère Ismaël se lance dans une bataille pour la vérité. D’après une histoire vraie.
On a aimé
- Nous avons aimé la relation entre les deux frères.
- La scène de fin est émouvante, elle a laissé le public sans voix.
- Nous avons apprécié le jeu des acteurs qui n’a pas manqué d’interpeller le public.
- Nous avons été touchés d’apprendre qu’il s’agissait d’une histoire vraie, celle du réalisateur.
- Un très beau film sur le deuil, qui célèbre la vie.
À la suite de la projection du film, nous avons eu le plaisir d’accueillir le réalisateur Rachid Hami et l’acteur interprétant le rôle de Ismael : Karim Lecklou. Les festivaliers ont pu poser leurs questions et donner leurs premières impressions sur le film.

Rachid Hami a commencé par confier aux spectateurs qu’il avait eu besoin de temps pour écrire. En effet, il explique avoir écrit le scénario pendant 6 ans pour le terminer en 2020. Ce dernier a toujours voulu raconter l’histoire de la relation qu’il entretenait avec son frère, nous confiant : « quelque part, on est devenus frères à Taïwan ». Mais c’est suite au décès de ce dernier à Saint Cyr en 2012 qu’il se plonge enfin dans la rédaction d’un scénario. On apprend seulement à la fin que ce film est dédié à son frère : Jallal Hami.
Entre fiction et réalité
Rachid Hami explique qu’il n’a pas voulu réaliser un film dans le pathos mais plutôt un film romanesque, un film de cinéma. Il s’est alors inspiré de ce qu’il a vécu, comme tous les metteurs en scène peuvent le faire traduisant ainsi son histoire en langage cinématographique sans respecter à 100% la réalité. Par exemple le père de Rachid Hami était médecin néanmoins dans le film le père d’Ismael et d’Aïssa (jouant le rôle du père du réalisateur) est représenté comme un gendarme pour montrer son attachement à son pays et son sens du devoir.
Étant donné que l’affaire avait déjà été médiatisée le réalisateur souhaitait monter ce que les médias n’avaient pas pu révéler : les personnes derrière ce drame, la famille. Une réelle volonté d’humaniser ce drame.
Le film s’articule autours de trois mouvements. Tout d’abord la jeunesse passée avec son frère en Algérie. Ensuite ce qu’il appelle « Antigone » en France où, accompagné de sa famille il s’est battu pour que son frère bénéficie de funérailles dignes de son engagement militaire. Ces deux mouvements sont ponctués de souvenirs qui retracent la naissance de la relation fraternelle entre Ismael et Aïssa à Taïpei.
« Je voulais que les gens vivent une histoire de cinéma avant d’exposer ma situation personnelle »
Un bon casting


Karim Leklou, interprétant Ismael a reçu les compliments de la salle au vu de son jeu d’acteur. En jouant avec ses yeux, il transpire de réalité et remercie d’ailleurs sa mère tout en plaisantant : « c’est grâce à elle que je travaille chaque jour ».
Dans le film, ils ont l’occasion de travailler avec des enfants jouant le rôle de Ismael et Aïssa plus jeunes. Le réalisateur nous a avoué : « on ne cherche pas des enfants acteurs mais on cherche des enfants intelligents, éveillés et capables de réagir à ce qu’on leur dit » en réalisant un casting sauvage. Karim Leklou a souligné la bienveillance du réalisateur car ce dernier laisse une place à l’échec ce qui n’est pas le cas de tous les réalisateurs avec qui il a eu l’occasion de travailler afin de permettre aux enfants, en particulier, d’évoluer dans un climat de bienveillance. Cette bienveillance et cette « organisation de l’échec » permettent aux acteurs de se sentir eux aussi en confiance en sachant qu’ils ont eux aussi le droit à l’échec.
Échange avec le public
Certains festivaliers se sont avoués étonnés car ils pensaient voir un film de procès et avouent avoir été agréablement surpris de la subtilité dont a fait preuve Rachid Hami pour monter un film centré sur le deuil et non centré sur le procès que le film sous entendait. Les festivaliers ont apprécié le côté « intime » du deuil que dévoile le film.
Une festivalière a noté le clin d’œil à Arras, un territoire marqué par la guerre, en un soir du 11 novembre. Rachi Hami s’est montré touché face à cette intervention et a conclu avec Karim Leklou « on repart heureux d’Arras ».
Eléonore Yvart et Constance Fourrier